jeudi 12 juin 2014

Je suis allée me perdre de plein gré, à l'écart de la route touristique et des autres, dans des petites routes de montagne aussi belles que propices à me faire vomir, tournantes, étourdissantes. Conssentir à me taper tant de beauté sauvage même au prix du contenu de mon estomac peu collaboratif. Liberté.

Coup de coeur total pour la douceur dépaysante d'un détour, malgré le soleil qui plombe furieusement et transforme tout ce qui vit entre midi et 16h en larve, devant des ventilos qui semblent cracher du vent de séchoir à cheveux plus que de quoi se rafraîchir. 

Ce n'est qu'en soirée que les montagnes qui bordent les champs reprennent leurs droits et envoient des orages qui déchirent avec puissance le bleu du ciel, au dessus du vert infini des rizières. 

Là, comment ne pas tout oublier, subjugués, et pourtant, je n'oublie pas. Je vis de cette conscience apaisée. La force des éléments en redonnent a tout le monde. Et ce vent de fin d'après midi qui remue tout... Fraicheur humide.

Pendant quelques instant, chaque soir, j'ai cru sentir le calme tranquille d'avoir les deux pieds au milieu de ma minuscule place insignifiante dans l'univers. Reconnaissance. Humilité.

J'aimerais ne pas retrouver le chemin du retour. Je pourrais vivre dans ces rizières qui s'étendent comme la paix entre les montagnes de la minorité thaïe blanche, dans ces maisons de bambou souple sur pilotis, simples mais raffinées, avec ces fêtes du soir sur lesquelles coulent l'alcool de riz pour célébrer la fraîcheur et reprendre du courage pour l'avant midi aux champs. Je pourrais peut être même me mettre au karaoké. Peut être... 

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Lorsque j'étais encore a l'âge des rêves infinis, dans l'ombre des feuilles et des filles d'où je suis née, Montréal me semblait loin comme le bout de la terre.  

Maintenant que j'habite ma fin du monde, je redecouvre les grands espaces dans ma tête plutôt que sous les drapeaux. Tout les rêves y sont encore, dans ce coin de moi impassible au passage du temps, mais enterré par la monotonie et le désespoir des jours, ou plutôt par ce qu'il faut de joie feinte et crue pour continuer la vie standardisée qu'on nous a servi et que l'on sert depuis.  Apparences qui nous étouffent lentement. 

Devenir adulte, c'est aussi désapprendre ce que l'instinct savait, au profit des désillusions des autres. L'enfance a raison, exubérante, douce, le coeur grand ouvert.  On passe ensuite sa vie de grand a essayer de recoler son fragile cristal en coeur d'enfant, capable d'inventer toutes les couleurs. 

Grandir vraiment, se chercher, se deviner, suffoquer sous les mètres de poussière noire qui prennent les airs et attaquent les poumons. Tout ce qu'on avait refusé d'affronter et dans lequel on se lance tête première, juste pour l'espoir d'arriver a sentir sur sa peau nue la douceur d'un courant d'air pur. Juste pour cette petite chose de rien du tout: l'essentiel.

Se sentir enfin vivre dans la ville brute, belle dans l'instant qui la rend vraie. Être.

Chercher l'infini en soi plus que sous les drapeaux, la vie, la capacité de toucher l'insaisissable instant, pour être capable de sentir se qui fait la vie belle plutôt que poursuite. 

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Tempête. Le ciel, comme un vieux neon, semble hésiter entre le noir profond et la lumière blanche électrique des eclairs. Il coule de partout sur le toit des chandelles improvisées, bruit assourdissant de la pluie sur les toits ouverts, mêlée au tonnerre et aux quelques humains qui continue de vivre dans le noir. Les bambous se courbent et je suis fragile comme eux, prise, transportée. L'électricité s'est concentrée dans le ciel, au dessus des humains. Tu pleures parce que tu as un peu peur, petites fille, et moi, parce que c'est beau et que ça ne dure jamais, mais que c'est là, maintenant, et que ça me remue les tripe et le corps de vie.

C'est l'heure du retour. 

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